Les députés se sont réunis en commission pour étudier l’application de la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte. Sans vouloir tout renier, ils ont tout de même largement pointé les retards pris dans la mise en œuvre.
Insatisfactions, insuffisances, difficultés… Au deuxième sous-sol de l’Assemblée nationale, en salle 6241, le maître-mot ce 26 octobre au matin fût sans doute « regrets ». Les députés des commissions du Développement durable et des Affaires économiques se sont réunis pour la présentation du rapport de la mission d’application de la loi sur la transition énergétique.
Plus d’un an après l’adoption de la loi, les députés se sont penchés sur sa mise en œuvre. Le périmètre couvert est de taille : le texte couvre des sujets aussi divers que le nucléaire, les énergies renouvelables, les sacs plastiques et le statut des colonnes montantes dans les immeubles d’habitation. Bilan ? Tout n’est pas négatif, mais les députés ont laissé paraître un sentiment d’inachevé.
« Les résultats sont déjà au rendez-vous et les outils sont utilisés », a positivé le socialiste Christophe Bouillon. « Pratiquement trois-quart des actes réglementaires ont été publiés », évalue -t-il. Pour le reste, « les textes réglementaires sont en préparation ». Par exemple, concernant le chapitre IV sur l’économie circulaire, « l’application apparaît globalement satisfaisante », note le rapport. Mais en explorant le détail des 215 articles, le bilan s’avère très contrasté. Les députés n’ont pas manqué d’exprimer leurs regrets et insatisfactions.
La loi sur la transition énergétique demandait 26 rapports d’information au gouvernement. « Or, aucun de ces documents n’a été fourni dans les délais », déplore la mission parlementaire. Seuls 3 ont été publiés, l’un avec des données en partie déjà dépassées au moment de sa parution. Au ministère de l’Environnement, la direction générale de l’énergie et du climat a été interrogée sur ce point. Parmi les rapports attendus, elle envisage « une publication rapide de six d’entre eux seulement, ce qui ne peut être considéré comme satisfaisant », tranchent les députés.
Secteurs par secteurs, la critique se fait aussi entendre. Le titre II sur le bâtiment est « sans doute celui sur lequel les points d’insatisfaction sont les plus nombreux », déplore la socialiste Sabine Buis. Elle dénonce même « une application insuffisante de la loi ». Parmi les mesures très attendues, figure ainsi la définition d’un bâtiment à énergie positive. Ou encore, celle des critères minimaux de performance énergétique. Les dispositions sur le carnet numérique du logement et sur l’individualisation des compteurs de chauffage dans les immeubles sont également en retard.
Dans les déchets, des avancées sont évoquées. Par exemple, sur l’interdiction de la vaisselle en plastique et sur la filière de responsabilité élargie du producteur (REP) pour les bouteilles de gaz. Même si, pour cette dernière, le décret est paru très tardivement et ses effets restent à confirmer. En revanche, Sabine Buis, qui était rapporteure pour ce volet de la loi, regrette le report de la REP applicable aux navires de plaisance. « Une report nullement justifié », estime-t-elle. La députée d’Ardèche dénonce aussi les assouplissements accordés à l’ensemble de la presse sur la REP papier.
Au-delà des seuls déchets, la loi traitait de l’économie circulaire, un sujet cher à François-Michel Lambert. Le député des Bouches-du-Rhône salue l’inscription dans la loi d’une définition « claire et ambitieuse » de l’économie circulaire. Mais il déplore l’absence de stratégie de transition vers ce nouveau paradigme. Pour montrer le chemin et mettre en mouvement toutes les politiques publiques, « il n’y a pas de vision claire », dénonce-t-il.
On peut aussi citer le cas des énergies renouvelables. Si le photovoltaïque voit son avenir se dégager, « il semble difficile de conclure que la loi marque une nouvelle impulsion pour l’éolien », concède la députée socialiste de l’Isère Marie-Noëlle Battistel. Plus largement, la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) s’impose comme le grand raté de l’année écoulée. « L’expérience de la PPE n’est pas satisfaisante », assène Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du Développement durable. Pro et anti-nucléaires s’accordent d’ailleurs sur un point : « L’absence totale de trajectoire claire sur le nucléaire », formule l’UDI Bertrand Pancher, qui dénonce « l’incohérence quasi-généralisée entre les moyens mis en œuvre et les objectifs ».
Existe-t-il des points positifs ? La progression de la contribution climat-énergie dans la fiscalité, évoque Bertrand Pancher. Mais l’impression générale reste la déception. « J’ai le regret de voir le retard que prend la France dans ses engagements sur l’énergie nucléaire », illustre l’écologiste Brigitte Allain. « Il faudrait fermer 5 à 8 réacteurs d’ici à 2018, puis 19 à 24 d’ici à 2023. Ce n’est pas un choix dogmatique, mais la condition de réussite du développement des énergies renouvelables. » Bonne nouvelle : il reste six mois avant la fin du quinquennat pour corriger le tir.
Thomas Blosseville
Source : environnement-magazine
http://www.environnement-magazine.fr/article/48357-loi-sur-la-transition-energetique-les-regrets-des-deputes/
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